GLOBES

 

 

Que dire de ces mappemondes? Elles flottent, immobiles, dans cette vacuité pigmentaire où les noirs et les bruns se conjuguent,ce n’est que le globe terrestre tel qu’on le représente. C’est une image qui a pris consistance, comme si la peinture lui avait insufflé une nouvelle faculté de voyager dans l’espace . Voici une sphère colorée tout ce qu’il y a de plus conforme à son image,  elle s’élève dans le firmament pour demeurer en suspens, énigmatique, pour ne plus en bouger. A mesure qu’il avance dans sa réflexion, le peintre commence à modifier imperceptiblement les contours caractéristiques  des continents, il les rend plus indécis, plus flous. Il les fait se dissoudre dans la matière, se contentant d’un jeu entre les bruns de la terre et les bleus des océans. Peu à peu, les cinq continents se dissolvent. Ils ne sont plus tout à fait reconnaissables. Enfin,  ils s’anamorphosent et perdent toute relation évidente avec ces points du globe où l’on étudie la géographie de notre monde. C’est désormais une planète qui n’appartient plus qu’aux caprices et aux fantasmagories de l’auteur de ces mappemondes oniriques. Il tient néanmoins à maintenir une ambivalence  trouble et confondante entre le crédible et l’incroyable. La substitution n’est pas visible du premier coup d’œil. Ce faisant, il jette un pont secret entre l’enfance qui a laissé derrière lui, mais qui a trouvé refuge dans une île cachée au fin fond de son cerveau. Cet instant où il se confronte avec la toile et doit prendre la décision qui change son caractère et son intensité. Ce qui se pense dans la peinture  ne peut que prendre les couleurs d’une autobiographie en filigrane. Mais c’est aussi une vision du temps présent : dans l’une de ses œuvres récentes, l’artiste  attribue  des formes explicites  aux continents, les changeant en des soldats au combat, chacun  d’entre eux devant affronter l’autre avec acharnement. Sans doute  assiste-t-on à une mutation déterminante de  l‘orientation  de son œuvre.

Un tableau est une machine à rêver car c’est d’abord une machine à penser.  Xavier Vantaggi  n’a pas oublié  les leçons des maîtres d’autrefois. Il a eu le désir et l’énergie de les mettre en application dans un champ d’expérience difficile et souvent miné. Et ce qui rend son entreprise si convaincante, c’est qu’il est parvenu à ramener ses intuitions et ses questionnements à des formes limpides et simples. Des formes qui ne cessent plus de fasciner.